Claustra, c'est une histoire qu'on ne peut pas croire... Non... Plutôt qu'on ne veut pas croire....
Claustra, c'est un roman.... Où est ce l'adaptation d'une histoire vraie qu'un écrivain génial a voulu conter dans toute son horreur, son absurdité, en étant sans cesse à la frontière de l'humour noir, du réalisme effrayant et du suspense...?
On ne sait pas bien, mais ce qui est certain, c'est que de cette histoire on ne s'en détache pas facilement.
Quel mélange étonnant.
Si je vous dis que ce roman raconte le délire fou d'un père, Fritzl, qui a décidé d'enfermer sa propre fille, Angelika, dans une cave, de "créer" avec elle une famille en lui faisant des enfants, qui eux même auraient ensemble d'autres enfants.... Peut on juste imaginer que les délires d'un cerveau malade pourraient ne pas être maitrisés, stoppés? Non me direz vous! On se rendrait rapidement compte d'un problème dans le voisinage, il y aurait tant de suspisions que "l'aventure" ne pourrait pas durer bien longtemps....
Plus de 25 ans...
Fritzl à mené sa double vie plus de 25 ans.... sans que jamais personne ne l'arrête... 25 années à construire son autre "famille" à l'abri des regards...
Plusieurs enfants sont nés dans cette cave d'une pauvre Angelika cloitrée à l'âge de 18 ans. Ils sont nés de viols répétés, ils sont nés de l'amour aussi. D'un amour malsain, malpropre, incompréhensible pour toute personne douée de sens. Mais d'amour quand même parce qu'Angelika n'avait que cet homme à aimer. Personne n'a pris la peine de savoir d'où venaient les enfants qui apparaisaient soudain chez ce père de famille. La mère, la matriarche, n'était jamais enceinte? Tout le monde préférait surement croire que ces enfants avaient été déposés là par cette Angelika disparue dans une secte, comme ils disaient, qui n'était pas capable de s'en occuper... Des enfants dans un état lamentable étaient amenés à l'hopital sans le moinde papier d'identité? Cela donnait lieu à quelques interrogations, mais pas bien davantage... Les voisins entendaient régulièrement des bruits étranges provenant de la cave? Après quelques discussions houleuses avec son propriétaire, les gens incommodés préféraient déménager.... Et cette femme, la femme de ce fou, qui a préféré fermer les yeux sur tout plutôt que de se révolter. La manière dont sont racontés les arrangements de cette femme avec sa conscience, probablement malade elle aussi, est géniale.
Régis Jauffret entre dans les esprits de ces gens, nous fait presque comprendre leur raisonnement, nous fait partager les douleurs, les espoirs, les sensations d'une manière absolument remarquable.
Si vous voulez lire une histoire de fous, je vous conseille celle-ci.
"L'oubli est secourable, il préserve de la cruelle nostalgie. Oublier l'enfant mort, oublier surtout qu'il y a un autre monde, un paradis en plein air où on ne sera jamais envoyé pour bonne conduite. Un lieu dont on a été arraché comme de l'herbe qui ne quittera plus l'étable avant d'être broutée l'hiver prochain par les bêtes.
Elle s'eforcait de nier l'extérieur. Un lieu chimérique, une croyance, une superstition contre laquelle on doit lutter afin d'éviter de prendre son existence pour une illusion. Le malheur de se sentir exilé, d'imaginer que sa vie est un supplice continuel, une punition qu'on n'a pas le courage d'interrompre en décidant d'arrêter de respirer. Elle ne voulait plus entendre parler de ce passé qui continuait la haut." Claustra, Régis Jauffret - éd Point